vendredi 11 mai 2012

Manakar-Fianarantsoa en train

On a découvert l'existence de ce train il y a quelques mois à l'occasion d'un reportage -genre "des trains pas comme les autres" et nous voilà prêts à y embarquer ! Forcément, çà fait un peu bizarre...


Départ 6h45. Il convient d'arriver en avance. Quand on arrive sur les 6h , il y a déjà beaucoup de monde et toute une vie s'est organisée devant la gare. Une femme a même dressé un véritable buffet, tables, bancs et propose café, thé, tartines, confitures, fruits et même pains au chocolat ou pain perdu !! On va y faire un petit déjeuner qui restera dans les annales !

Presque 6h30. On rentre dans le hall où se presse une foule bon enfant. Le train est en gare -il est arrivé hier soir- mais l'accès au quai est fermé. 6h40, il ne s'est rien passé... 6h45, heure prévue du départ... toujours rien... 7h, le préposé au contrôle des billets prend place dans sa guérite et vérifie un par un les titres de transport. Forcément, çà n'accélère pas les choses.


Pas loin de 7h15 quand on pénètre enfin sur le quai... Le wagon de 1ères -les vazahas n'ont pas le choix- est à l'arrière du train. Et nous, à l'arrière du wagon ! Côté "1ères" pas d'emballement ! çà rappelle un peu les vieux trains de banlieues... en plus vieux ! Banquettes défoncées, plancher aux lattes disjointes, voire manquantes, porte-bagages brinquebalants... On investit notre territoire d'une journée -2 banquettes face-face rien que pour nous! puis forts de nos expériences ferroviaires précédentes, on redescend nettoyer nos vitres, y compris celle de l'arrière du train. Bah oui, c'est mieux pour les photos !


7h30, rien... 8h, toujours rien. Mais sur le quai, l'activité est intense. Chargement des marchandises, petits revendeurs...

8h15, le départ !! La seule ligne de voyageurs de Madagascar prend son élan. Très vite, on comprend pourquoi les Malgaches appellent ce train le TGV... TGV comme Très Grandes Vibrations... çà va être sportif !


Au bout de quelques minutes à peine, une fois traversée la piste de l'aéroport, première halte. Aussitôt, ce qui au fil du voyage, va devenir un rituel se met en place. Des centaines de personnes semblent former une haie d'honneur et prennent l'assaut du train, parfois même avent son arrêt.


Une multitude de petits vendeurs se précipite aux fenêtres, sur les marchepieds ou à l’intérieur des wagons, et propose mandarines, bananes, beignets de légumes, sambos, oeufs durs voire écrevisses. C’est dire si le menu est vaste. Chaque village a sa spécialité. Ce sympathique buffet géant dure tant que dure le chargement des marchandises : 10 minutes, 20, 30 ou plus...

Mais il traduit aussi une tout autre réalité. Le passage du train est vital pour les paysans qui y embarquent leurs récoltes, leurs familles qui proposent de quoi améliorer le pique-nique des voyageurs mais aussi pour toute une population dépourvue qui vient quémander de quoi survivre, s’accrochant au moindre regard pour attraper un biscuit, un bout de sandwich ou une bouteille en plastique qui finira en récipient ou en épouvantail au milieu des cultures.


Dénuement et impuissance dont ne manquent pas de profiter deux de nos compagnons de voyage. Un policier et un gendarme, en grande tenue. A chaque arrêt, ils font embarquer des soubiques entières de produits agricoles. Dans l'entrée, dans les allées, sous les sièges, sur les porte-bagages... bientôt elles ont envahi tout l'espace disponible. Leur technique est imparable. A chaque gare, ils remontent le quai, font livrer les marchandises dans le wagon de queue et au départ du train, campés sur le marche-pied, lâchent quelques milliers d'Ariary pour le tout...


Au rythme lancinant du clac-clac-clac des roues, à 20 kms/h, à flanc de montagne, le train franchit les ponts, saute les rivières, traverse les tunnels, taillade dans les branches qui envahissent la voie … Les paysages sont grandioses, luxuriants, succession de rizières, de bananiers, de caféiers, de palmiers, de sapins, d'eucalyptus. Une chose est sûre, on ne s'ennuit pas un seul instant.


Bien sûr on va passer les trois dernières heures dans le noir quasi complet -et non, pas d'éclairage, juste nos lampes torche! et arriver à Fianarantsoa après 11 heures de voyage mais avec tellement d'images, de souvenirs de rencontres plein la tête. Et surtout avec le sentiment d'avoir vécu une aventure ferroviaire comme il y en a encore peu au monde !